Le dessin de l’enfant, expression de la maîtrise du corps

Il n’est pas rare de voir, à la sortie des écoles, un enfant victorieux, brandissant son dessin en direction d’un adulte. Celui-ci accueille parfois la production avec peu d’intérêt, le dessin n’ayant ni la forme convenue, ni beaucoup de réalisme. Le dessin rejoint alors la poche de l’adulte, puis ensuite la poubelle. Cette attitude n’est pas due seulement au désintérêt, elle est aussi liée à une méconnaissance des stades de développement de l’enfant. Le graphisme nécessite la maîtrise du corps et des gestes, et à ce titre le dessin de l’enfant est révélateur de sa motricité. Du gribouillage au traçage puis à l’expression par le dessin, le chemin sera relativement rapide.

Le gribouillage
De 12 à 15 mois, l’enfant parvient à effectuer des tracés rectilignes ou des courbes obtenues par flexion de l’avant bras et du poignet maintenu raide ; de 15 à 20 mois, par extension ou flexion de l’avant bras, l’enfant effectue des tracés de balayage en va et vient continu ; de 20 à 28 mois, il trace des figures circulaires grâce à la coordination des mouvements du bras et par rotation de l’avant bras. Vers l’âge de 2 ans, le dessin est plus varié, les traits sont discontinus, l’enfant dessine des lignes et des boucles de différentes tailles. Il arrive aussi à limiter son geste à l’intérieur de la feuille de papier, ce qui soulage un peu la table de « tatie » des débordements. Le développement du contrôle moteur va permettre le contrôle visuel. On ne devient pas peintre en un jour, et avant d’avoir un dessin souvenir, l’assistante maternelle devra patienter quelque peu

le traçage
A l’âge de 2 ans on constate une liaison entre l’œil et le mouvement du bras. A l’âge de 28 mois l’enfant peut tracer une ligne à partir d’une ligne déjà tracée pour construire des angles.
Après 30 mois, l’enfant contrôle le point de départ et le point d’arrivée de son trait, toutes les conditions sont remplies pour que l’enfant commence à dessiner sous une forme plus reconnaissable par l’adulte. Toutes ces indications d’âge, doivent bien sûr être prises avec souplesse, les variations entre les enfants étant importantes, tout comme elles le sont pour l’acquisition de la marche.

Le dessin de l’enfant expression de sa personnalité et porte ouverte sur son monde imaginaire
A partir d’environ 2 ans, l’enfant accède au dessin symbolique, c'est-à-dire qu’après avoir tracé des traits sans signification il va donner du sens à ses productions graphiques, ces dernières vont avoir valeur de symboles, les dessins vont renvoyer à autre chose qu’à eux-mêmes. Le dessin sera souvent accompagné d’une activité verbale, par exemple d’un trait sera accompagné de bruits venant nous montrer que l’enfant est en train d’imaginer une voiture qui roule
Vers six ans et plus
l’enfant de cet âge ne veut pas représenter quelque chose de précis, il veut simplement laisser une trace sur le papier et son expression verbale manifeste la manière subjective dont il éprouve le monde. C’est pourquoi le dessin, avant d’être une représentation précise de quelque chose, est plutôt de l’ordre de l’idéogramme. Ou pour le dire autrement, l’enfant va dessiner un rond et dire que c’est le soleil, ou un ballon, ou tout autre chose, son dessin pouvant changer de sens d’une seconde à l’autre. La forme n’est pas fixe, elle exprime un sens qui peut varier et n’est pas le fidèle reflet de la réalité, d’où la perplexité de l’adulte et son incompréhension. L’expression qui accompagne le dessin est donc plus importante que le dessin en lui-même, ce qui signifie qu’il n’y a pas d’interprétation réaliste d’un dessin d’enfant sans le discours qui l’a accompagné, du moins à cet âge là.
Pour que le dessin devienne plus proche de notre façon de voir les choses, il faudra attendre 3 ans environ avec l’apparition du premier bonhomme têtard. Il a une drôle de mine ce bonhomme têtard dans sa forme élémentaire. Un gros rond, un ou deux bâtons pour les jambes, un œil comme les borgnes, voire deux, dans le meilleurs des cas. Il faudra se contenter de ce bonhomme-là, parfois jusqu’à l’âge de 5 ans, sans que cela soit inquiétant. Somme toute, le peintre Dali et d’autres ont aussi de curieuses façons de représenter l’humain. Nos petits peintres en herbe ont bien le droit à la créativité.
Vers 5 à 6 ans, parfois avant, un second rond apparaît, il représente le tronc, les bras descendent et ne sont plus rattachés à la tête. Les doigts aussi font leur apparition, leur nombre posera longtemps d’insolubles questions à l’enfant. Combien sont –ils ? un, deux, six ? Enfin, vers 6 ans et plus, le bonhomme s’habille.
Dessin sur leur père de CE2

S’articule, et plus l’enfant grandira, plus il attachera de l’importance à distinguer les sexes par les vêtements, les bijoux, voire le sexe lui-même. Ce sont ces dessins achevés, que l’adulte préfère, mais tout le cheminement antérieur a été nécessaire avant d’en arriver là.
Faute de soutien ensuite, faute d’intérêt pour cette activité, le dessin progressera peu. Demandez à un adulte de dessiner un bonhomme et vous serez surprise de la production. Alors peut-être, pour clore ce petit dossier, pourrions-nous lancer un appel à toutes les assistantes maternelles qui ont des enfants de 4 ans et plus en accueil périscolaire. Demandez-leur de dessiner leur « tatie » et envoyez nous une copie de ce chef d’œuvre à la revue. Qui sait, peut-être pourrons-nous en faire une jolie exposition. Toutes à vos crayons !