mon premier jour chez la nounou

LE GRAND JOUR
C’est le grand jour, mes parents me réveillent
Plus tôt que d’habitude, maman est un peu énervée,
papa la bouscule en lui disant « ça va bien se passer »
et moi, je suis là. Je n’ai pas trop faim ce matin et j’aimerais
bien prendre mon temps…….comme d’habitude.
J’ai un peu plus de trois mois et ma mère reprend le travail
aujourd’hui, je vais donc me rendre chez ma tata,
mais…..Je ne sais pas pourquoi elle s’appelle comme ça,
puisqu’elle n’est pas de ma famille !
On pourrait l’appeler par son prénom.


Malgré la période d’adaptation
Enfin on y va, je l’ai déjà vue cinq jours pour une période d’adaptation chez elle et je sais qu’il m’aurait fallu plus de temps pour me repérer, car, si je me souviens bien, c’est complètement différent de ma maison. Je n’ai néanmoins pas trop pleuré ce jour-là, alors mes parents ont décidé que cette assistante maternelle était bien pour moi, c’est peut-être vrai.
Comme je ne peux pas m’exprimer avec des mots, j’ai un ressenti tout particulier, tout m’interpelle : la dureté du matelas dans mon lit, les odeurs, les bruits, la façon qu’elle a de me donner mon biberon.
Mais aujourd’hui, pendant le trajet qui me conduit chez mon assistante maternelle, j’entends ma maman qui renifle. Je crois qu’elle pleure silencieusement.
Quand on arrive, ma mère dépose mon petit sac. Dedans il y a mon doudou ou ce que les spécialistes nomment mon « objet transitionnel ». Je sais que cela va vraiment me servir. Depuis peu, je suce en plus mon pouce et c’est si bon. Mon doudou, c’est le lien entre mon monde à moi et l’extérieur que je perçois sans savoir vraiment de quoi il se compose.

Apprendre la séparation
Mes parents partent vite, car l’assistante maternelle leur dit de ne pas trop rester, elle a remarqué leur mal-être et cela la dérange un peu. Moi j’aimerai bien plus de câlin pour ce premier « au revoir », je vais passer huit heures avec elle, c’est écrit sur le contrat et elle va s’occuper de moi.
Je ne suis pas seul dans cette maison, l’assistante maternelle a deux enfant s à elle et une petite fille de vingt-deux mois en accueil qui arrive en rigolant. Elle a déjà compris que sa maman reviendra ce soir.
Moi, c’est le flou absolu, je suis dans ma toute-puissance, je veux tout, tout de suite, vite et sans attendre, sans repère dans le temps et l’espace.
Mon assistante maternelle me câline quand je pleure, mais dans quelques jours il faudra que cela change, car elle n’a pas que moi à s’occuper…bon.
Je vais apprendre la séparation, c’est une vraie épreuve pour moi, mes parents, mais peut-être encore plus pour ma maman. Alors, l’assistante maternelle est gentille avec eux. Elle les a autorisé pour une semaine à téléphoner deux fois dans la journée. Je sais que maman aurait souhaité me garder auprès d’elle un peu plus longtemps mais elle aime beaucoup son travail.
Elle me donnera la téter le sein ce soir, j’apprécie ce moment privilégié avec elle : Papa se demande si cela va durer encore longtemps, il la voudrait un peu plus douce avec lui, mais… elle est à moi, rien qu’à moi !
En fin d’après midi, j’entends des cris, l’autre petite fille fait beaucoup de comédie et de bêtises quand elle doit partir avec ses parents.
Tous les professionnels disent la même chose : « Quand les parents arrivent, les enfants sont pénibles. »
Pourquoi réagissons-nous tous comme cela

Apprendre la place de chacun
Nous devons interrompre la relation avec notre assistante maternelle pour passer brusquement à une autre forme d’amour avec nos parents, c’est le charivari dans notre tête, et on fait n’importe quoi pour attirer l’attention.
Je n’ai pas bien dormi aujourd’hui, l’assistante maternelle a tout inscrit sur un cahier de transmissions qu’elle montrera ce soir à mes parents, mais justement, maman est en retard pour venir me chercher et l’assistante maternelle n’est pas contente ; il est écrit sur le contrat que je partirai à 17 h, il est 17h20, alors gare aux récidives…….
Mon assistante maternelle a envie de se retrouver seule chez elle avec ses enfants et, même si elle travaille à son domicile, elle a une vraie vie en dehors de moi.
D’ailleurs, je crois que je vais être bien si je vois que son amour n’est pas trop envahissant.
Si la personne qui m’accueille fait « comme avec ses enfants », mes parents pourraient être jaloux et même peut-être pourraient-ils entrer en rivalité avec elle.
Je ne veux pas de cela, j’attends des adultes un équilibre même si je vais bientôt m’apercevoir que personne n’est parfait.
Mais je pense à quelque chose….. Pourquoi mon assistante maternelle ne travaille pas en dehors de chez elle ? Aurait-elle du mal à se séparer de ses propres enfants ?